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    28 décembre 2014

    J'avais aimé le premier tome, j'ai aimé le deuxième, même si parfois on peut se perdre dans l'évocation des villes et villages traversés. Jacques Tardi s'appuie sur les carnets de son père, se met en scène, petit garçon posant des questions à René, notamment sur les inexactitudes de ses notes, sur les erreurs manifestes ou les oublis. Dessin classique pour Tardi, trois grandes cases par page, peu de gros plans, souvent des plan larges, du noir et blanc -sauf la fin. Une bande dessinée extrêmement pédagogique qui reprend les grands moments de la guerre, l'avancée des Russes et des Américains et des Anglais, qui redit une fois encore -mais qui n'est pas une fois de trop- l'horreur des camps de concentration, la solution finale, tout cette haine et cette folie imaginées par des hommes pour détruire d'autres hommes.

    Le temps passant, la liste des rescapés s'amenuise, il est bon que des récits, des témoignages gravent dans le marbre ou le papier ce qu'ont enduré les gens vivant à cette époque, les juifs bien sûr mais aussi les tziganes, les homosexuels, les handicapés, les prisonniers de guerre. Travailler sur différents supports, les livres, les films, les bandes dessinées, est une excellente idée qui peut élargir le public touché.
    Cette BD est d'un abord aisé, elle est le reflet du discours d'un simple soldat français : elle raconte son quotidien, les marches forcées, le froid : "Ces uniformes, que nous avions sur le dos depuis cinq ans, usés et élimés jusqu'à la corde, sans cesse rapiécés tant bien que mal, nous protégeaient à peine du froid. Je portais sur moi plusieurs couches de hardes, tout ce que j'avais pu trouver au camp pour avoir moins froid. J'avais même coupé des bandes dans la longueur d'une couverture et les avais enroulées autour de mon torse et de mon bide sous ma vareuse, en guise de coupe-vent." (p.9). Froid dont parle Michel Butor également encore adolescents au moment de la guerre : "J'ai l'impression d'avoir toujours eu froid pendant les années de la guerre. Même les étés me semble-t-il étaient froids." (In Improvisations sur Michel Butor).
    Tardi sait se faire également pédagogue lorsqu'il parle des Lebensborn : "Des femmes mariées ou des filles-mères certifiées conformes pouvaient y accoucher en grand secret, à condition de refiler le môme à la SS. Les lebensborn étaient aussi des lieux de rencontre où des "Aryennes" pouvaient se faire engrosser par des SS..." (p.23), mais aussi de la fin de la guerre et du partage de l'Europe entre les Alliés.
    Une série à lire d'urgence.